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“Halima est une secrétaire en université à qui l’administration avait commencé par lui reprocher ses[...]En savoir plus ”
Une foule d’internautes s’est insurgée contre la dernière parution du journal Causeur qui titre à la Une « Mennel, l’islamisme à visage citoyen ». Quelques jours avant, ce fut des militants du FN qui distribuèrent des tracts fustigeant la visibilité musulmane. Sous le titre « expulsons l’islamisme », la chanteuse fut apparentée aux disciples de Daech.
Une semaine plus tôt, la LICRA – l’organisme supposé combattre les préjugés racistes – publia elle aussi un dessin islamophobe où une femme voilée est assimilée aux soldats de l’« État islamique ».
Ce type d’amalgames grossiers ne surgit guère de nulle part. Il est le fruit d’une vaste campagne diffamatoire déclenchée par des experts autoproclamés de l’Islam, il y a une vingtaine d’années.
En l’an 2000, Gilles Kepel va bouleverser les esprits occidentaux en développant une série de thèses qui façonneront l’opinion publique dans le regard qu’il porte sur les musulmans traditionalistes, leur enseignant la peur, le repli et un imaginaire social néfaste.
Dans « Jihad, expansion et déclin de l’islamisme », le sociologue invente un concept jusque-là inconnu dans le monde : le « salafisme jihadiste ». Bien que ce « néologisme » soit basé sur une perception radialement erronée et du salafisme et du Jihad, elle sera très vite reprise et diffusée à grande échelle par les mass medias, instituant une confusion – et pas des moindres – dans l’esprit des gens.
Au cours de l’histoire, quand une prise de conscience émerge au sein de la communauté musulmane, ses membres gagnent progressivement en visibilité. Qui dit visibilité, dit souvent appréhension, préjugés, et par conséquent, exclusion et stigmatisation. C’est un peu ce qui se passe actuellement en France.
Les esprits haineux vont alors, au nom de la laïcité, déclencher une véritable « guerre des mots » à l’encontre des musulmans non acculturés. Suivra un conflit psychologique qui s’accentuera avec l’invention d’expressions de plus en plus ambigües inspirant aversion, effroi et dédain.
À ce stade de la propagande islamophobe, une adolescente « bien sous tous rapports » aura beau mettre un petit bandana rose et chanter la chanson d’un artiste juif, elle reste illégitime. En effet, si vous portez un signe d’appartenance à l’Islam (ou considéré comme tel), l’étiquette d’« islamiste » vous colle inévitablement à la peau.
Si aujourd’hui la fameuse Mennel((« Mennel » se prononce Manâl en arabe)) a pu être réduite à Daech, c’est bien parce que la majorité écrasante des musulmans n’ont pas jugé nécessaire de dénoncer les raccourcis tendancieux qui ont permis aux islamologues, depuis 2001, de lier la culture et les pratiques musulmanes au terrorisme. Chose qui aurait pourtant dû offenser autant que l’image de Mennel aux côtés de membres de Daech.
Le dernier numéro de Causeur, le tract du FN ainsi que le dessin de la LICRA ne sont qu’une suite logique et l’aboutissement très cohérent d’une longue campagne diffamatoire à l’égard des musulmans visibles. L’attaque a d’abord porté sur les plus discernables qui sont bien entendu les barbus et les moutanaqqibât (les femmes portant le niqab).
On a constaté que ces initiatives qui jettent le discrédit fonctionnent à merveille. Les politiques et leurs relais ont naturellement surenchéri. Les mêmes raccourcis et le même prêt-à-penser se sont ensuite institués à l’égard des musulmans qui portent des signes bien plus discrets et légers, tels que bandana, burkini ou jupe longue((Des signes loin de l’orthopraxie traditionnelle, mais plutôt nettement « moderniste ».)). Dans cinq ans, se mettront-ils à faire l’amalgame entre « prénom musulman » et « terrorisme » ?
Une chose est sûre, la jeune et candide Mennel a aujourd’hui ressenti ce que des dizaines de milliers de fidèles, tout aussi innocents qu’elle, ressentent depuis près de deux décennies.
Dans une longue interview accordée au Figaro Magazine, Gilles Kepel souligne l’importance de trouver des « interlocuteurs français musulmans » issus de la troisième génération d’immigrés pour « gérer le culte dans une optique française et républicaine ». Cependant, il ne faut surtout pas que ces possibles interlocuteurs, à l’issue d’un cursus universitaire, conservent des scories de leur identité islamique. Sinon ils auraient raté leur intégration et seraient en voie de radicalisation. Il semble que Kepel souhaite voir de nouveaux « Chalghoumis » qui, dûment diplômés et sachant réellement parler le français, sont entièrement asservis à la culture française.
À l’instar de Samuel Huntington, Kepel pense en termes de « pureté culturelle ». Pour lui, les cultures ne peuvent se croiser ou s’enchevêtrer et toute manifestation de la diversité culturelle est une atteinte à la « über-culture universelle » du « Surhomme occidental ». C’est pourquoi le « Hijâb Day » célébré par des étudiantes voilées à Sciences Po représente pour lui l’abomination suprême.
Bien qu’instruites et probablement cultivées, ces étudiantes en hijâb restent « visibles » en raison du maintien d’une partie de leur identité musulmane. Raison suffisante, selon Kepel, pour les raccorder à l’« islam radical ». Elles sont, en quelque sorte, considérées comme des traitresses qui, après avoir tété le sein de Marianne, n’ont pas adopté l’ensemble de ses valeurs.
Il faut savoir que la République considère tout citoyen étudiant dans ses écoles et universités, comme étant, pour ainsi dire sa propriété. C’est elle qui inculque –pour ne pas dire martèle – aux petites filles qu’il ne convient pas de mettre un voile sur ses cheveux et à l’ensemble des écoliers que le Prophète ﷺ était un homme barbare et préhistorique.
Si après tant d’années, l’étudiant musulman sort muni d’un diplôme universitaire sans être entièrement laïcisé, c’est qu’il n’y a pas de retour sur investissement. On aura alors droit à des interlocuteurs issus de la troisième génération d’immigrés qui « disposent de ressources intellectuelles pour se diffuser », mais qui refusent de promouvoir le culte musulman pour promulguer la doctrine républicaine ((Ce qui reviendrait à saper l’essence même de la religion musulmane).))
Dans « Terreur dans l’Hexagone, Genèse du djihad français », Gilles Kepel avait exprimé son désir de voir « l’émergence d’une nouvelle génération de penseurs musulmans à vocation universelle » qui devraient alors « servir de modèle aux autres musulmans du Dâr el Islam ». Autrement dit, ces nouveaux musulmans sont supposés réussir là où l’Occident a échoué ; dans la « civilisation » des peuples des anciennes colonies.
Il s’agit d’une facette de la « mission civilisatrice » largement appliquée par les colons britanniques en Égypte, en Inde, au Pakistan, etc. On y formait une classe gouvernante qui, instruite à l’occidentale, devait faciliter la politique de gestion des indigènes. Une fois diplômés, ces étudiants servaient de pioches destructrices dans leur pays d’origine où ils dirigeaient le programme scolaire en adoptant des orientations séculières. Ces « enfants de la colonisation » furent formés depuis leur plus jeune âge pour occuper les postes d’influence et permettre ce que Mahmoud Shâkir appelle la « vidange culturelle » des générations musulmanes à venir :
J’entends par “la vidange” le processus de vider les enfants de leur passé qui jaillit dans leur sang et qui les lie à la langue arabe et l’Islam. Les colons frayèrent ainsi le chemin pour remplir la jeunesse avec un passé insignifiant qui n’est pas le leur et qui sème en eux la confusion…
Le même procédé colonialiste est aujourd’hui appliqué sur les musulmans au cœur des sociétés occidentales. Par la colonisation interne, on prépare des « imams faits maison » sans rajouter le moindre ingrédient exogène. L’« islam de France » devient ainsi un outil pour garantir non seulement la pureté culturelle, mais aussi l’asservissement des musulmans qui adoptent une posture oppositionnelle.
C’est ici que les thèses néocolonialistes de Gilles Kepel contrastent nettement avec celles de chercheurs au discours plus éclairé. Auditionné par la Commission de l’Assemblée nationale en janvier 2016, François Burgat dénonça cette fâcheuse tendance à taxer d’islamiste tout musulman qui va à contre-courant du discours de domination sur leur communauté :
Dans l’espace public, on n’accepte que les musulmans amputés de toute dimension oppositionnelle. Nous aimons bien des musulmans savants et intelligents pourvu qu’ils cautionnent en quelque sorte l’assise du discours de domination sur leur communauté, sinon on les traite immédiatement d’intégristes. Ce que je dis moi, François, si Mohammed le dit, au bout de deux minutes, il est traité d’intégriste. Cessez de jouer avec les mécanismes de représentation des musulmans de ce pays, et de laisser des musulmans s’exprimer dans le débat public en ayant une posture oppositionnelle
Après avoir évoqué la « tendance républicaine » que devrait adopter la future élite musulmane, Gilles Kepel établit un contraste avec un « islam radical » qui « existe à côté de Daech » (notez bien l’amalgame). Celui-ci « prêche une rupture culturelle fondamentale avec les valeurs de la société française, mais », nous rassure le politologue, « peut être combattue politiquement ou intellectuellement ».
Pourquoi être porté par tant d’animosité ? Pourquoi parler de « salafistes qui prêchent une rupture culturelle fondamentale » et non de citoyens français de confession musulmane qui ont choisi de conserver leur identité et leur culture ? Pourquoi « combattre » ces musulmans plutôt que de « vivre ensemble » avec eux dans le respect comme cela se fait avec les juifs orthodoxes ? Pourquoi ne pas essayer de « comprendre » les différences d’autrui plutôt que de les « stigmatiser » ?
Le problème fondamental dans la pensée de Gilles Kepel est qu’il croit encore à l’universalisme des valeurs françaises. Il ne cesse de citer « le rayonnement de la France dans le monde » sans réaliser que les pays qu’elle a occupés ont pâti des conséquences et ténèbres de la colonisation.
Cet attachement viscéral à la France, serait-il imputable à un sentiment d’infériorité résultant de sa patrie d’origine ? Le père de Kepel était originaire de l’ancienne Tchécoslovaquie, un pays au passé sombre qui, selon ses dires, ne possédait aucune civilisation : « Étant quelqu’un avec un nom tchèque, je me sentirai éternellement redevable à la France, car elle nous a donné la civilisation ».((John Gravois, “The impresario: Gilles Kepel, scholar of radical Islam”, The National))
Kepel semble imaginer que son expérience personnelle ressemble à celle de tous les enfants d’immigrés de France. Raison pour laquelle il s’attend à ce que les musulmans vouent la même admiration aveugle pour la République. Or les musulmans de France ne sont pas tchèques. Ils ont leur propre histoire et leur propre civilisation (d’ailleurs autrement plus riche que celle de l’Occident).
Suivant cette logique, on estimera que toute personne qui ne se sent pas redevable à la France a un problème. C’est pourquoi Kepel décrit Mennel comme « la figure d’une jeunesse qui ne sait pas très bien où elle en est. » Une remarque qu’il n’aurait jamais faite si elle avait chanté les cheveux en l’air. Kepel déplore ensuite l’absence justement de cette « élite musulmane républicaine » qui aurait pu sauver Mennel de l’« idéologie sulfureuse » qui l’a poussé à mettre un bandana : « J’imagine que des instances cultuelles apaisées pourraient lui fournir une guidance en dehors de cet éparpillement doctrinal où se faufilent des idéologues sulfureux en quête de proies. » Voyez-vous, Mennel a besoin d’être guidée par des « musulmans aux diplômes universitaires » entièrement laïcisés qui pourront lui expliquer que pour parcourir « le chemin de la rectitude », il faut impérativement se découvrir la tête et cesser toute critique de la France de quelque façon que ce soit.
Rappelons que Gilles Kepel n’a jamais condamné le lynchage médiatique qu’a subi cette jeune fille. Bien que son approche diffère sensiblement de celle des groupuscules d’extrême droite, Kepel - toujours à mi-chemin entre contribution universitaire et engagement politique - livre un combat aux finalités analogues et cultive une idéologie sous-jacente aux traits communs. Ses paroles dépassent l'entendement à travers le jugement qu'il porte sur Mennel. Son analyse abasourdissante de Mennel a, pour cette raison, été reprise sur le site militant de FdeSouche.
Avec l’affaire Mennel, le socle commun que partagent Gilles Kepel et les adeptes de la fachosphère devient plus manifeste que jamais : toute visibilité islamique doit être stigmatisée, combattue, et publiquement humiliée.
Kepel le fait avec beaucoup de tact, le FN avec beaucoup de tracts...
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« Le Crime Islamologiste » analyse plusieurs termes inventés par les islamologues de France qui stigmatisent aujourd'hui la communauté musulmane. La propagation de nouvelles expressions se fait de manière tellement occulte que même le monde musulman ne semble pas être à l'abri de cette nouvelle conquête terminologique.
En raison de l’endoctrinement médiatique et du manque d’éducation islamique, un grand nombre de musulmans se sont réapproprié ces termes sans comprendre leur sens caché. L’article démontre comment des mots comme islamistes, salafistes quiétistes et jihadistes ont enflammé la France de haine et de colère contre les musulmans pratiquants...
Aucune réponse A "De Daech à Mennel, ou l’acmé des amalgames de Kepel"