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“Halima est une secrétaire en université à qui l’administration avait commencé par lui reprocher ses[...]En savoir plus Notes:”
Le massacre, la persécution ou la discrimination excessive d’une minorité sont toujours précédés d’un processus de déshumanisation où les membres de la minorité en question sont dépeints comme des êtres culturellement inférieurs. Ils sont alors souvent décrits comme de mauvaises herbes qu’il faut arracher du territoire pour assurer la survie du peuple de souche.
Dans l’idéologie nazie, la « pureté du sang » de la race aryenne allait de pair avec le concept de la « pureté culturelle ». Que les Juifs maintiennent leur culture et leur identité a profondément dérangé les « Aryens de souche » qui y voyaient un complot.
L’historien allemand et spécialiste de l’Allemagne nazie Hans Mommsen (1930-2015) décrit trois types d’antisémitisme. Les deux premiers, l’« antisémitisme culturel » et l’« antisémitisme ethnique » ont empêché les élites de se distancier des répercussions sanglantes du dernier : « l’antisémitisme racial ». L’antisémitisme dans la doctrine nazie s’est construit en plusieurs phases visant à chaque fois un autre aspect du « Juif » : d’abord sa culture, puis son ethnie et finalement sa race.
L’« antisémitisme culturel » était un élément clé dans la campagne médiatique des nazis. On y considérait que les Juifs possèdent des caractéristiques psychologiques et sociales néfastes qui s’acquièrent par l’acculturation ((Eric Kandel, « In search of memory: the emergence of a new science of mind ».)). Par leur culture, les Juifs tenteraient de corrompre la morale et la civilisation du pays dans lequel ils vivent.
Bien que les Juifs ne représentaient que 1 % de la population allemande, les nazis ont pu construire leur haine sur des siècles de préjudice chrétien. Hitler voulait un ennemi visible et utilisait le Juif comme l’opposant type sur qui tout le monde pouvait focaliser sa peur et ses frustrations.
Plus concrètement, son approche consistait à criminaliser la diversité culturelle par une mise en évidence de « la particularité du Juif ». Dans une seconde étape, ces différences étaient opposées à la « normalité » du surhomme allemand. En accentuant la nature exogène des Juifs d’Allemagne, les caricatures antisémites devaient établir le contraste frappant qu’offraient les juifs pratiquants. Très déterminé dans cette condamnation des spécificités juives, Adolf Hitler déclare dans Mein Kampf : « C’est le Juif qui offre le contraste le plus extrême avec l’Aryen.((En France, le précurseur des stéréotypes raciaux dont se distinguèrent les nazis fut Édouard Drumont (1844-1917). Dans son pamphlet antisémite La France juive (1886), il présente le Juif comme l’antipode de l’idéal aryen.)). »
Les nazis ont tout mis en œuvre pour exclure certaines minorités du spectre social. En janvier 1936, un rapport publié par le Sopade (le Parti social-démocrate d’Allemagne en exil durant le règne nazi) conclut que « de manière générale, les nazis ont accentué l’écart entre le peuple et les Juifs. Le sentiment que les Juifs sont une race entièrement à part est aujourd’hui devenu un sentiment général »((Ian Kershaw «Popular Opinion and Political Dissent in the Third Reich, Bavaria 1933–1945’.)). Dans l’ensemble des médias allemands, les Juifs étaient présentés comme une « race exogène » profitant du pays et empoisonnant la culture du peuple allemand.
Il était primordial pour le führer de composer un groupe cohésif et bien défini afin de déterminer qui serait exclu de la communauté. En identifiant publiquement et en traquant les minorités à ostraciser, la propagande nazie a pleinement contribué à la politique du régime. La population était incitée à la haine antisémite et à l’indifférence à l’égard du sort des Juifs. Entre 1933 et 1936, la propagande nazie était entièrement centrée autour de la création du mythe de la « communauté nationale » qui devait se fonder sur l’unité et la fierté de la patrie.
Durant les deux dernières décennies, plusieurs médias français ont adopté une approche similaire où le musulman — dès lors qu’il pratique ouvertement sa religion — n’est plus considéré comme faisant partie de la communauté française.
De nombreux journaux et magazines de droite essayent ainsi de creuser l’écart entre les Français de confession musulmane et les autres citoyens. Ils créent le sentiment que les musulmans visibles constituent un groupe religieux entièrement à part qui ne peut être toléré par la communauté nationale. On y rappelle sans cesse que le musulman pratiquant « en fracture avec la communauté nationale » offre le contraste le plus extrême avec le vrai citoyen français. Parfois, cela se fait avec une terminologie dénigrante, parfois avec des caricatures où les musulmans pratiquants sont décrits comme une espèce animale ((Voir « La contagion salafiste, révélations sur nos ennemis de l’intérieur », Valeurs actuelles n° 4246, 12 au 18 avril 2018.)).
En France, la méthode nazie de créer une « communauté nationale » pour exclure certaines minorités trouve son équivalent dans le concept de l’« identité nationale » promu par Nicolas Sarkozy durant l’élection présidentielle de 2007. Après son élection, celui-ci avait organisé un débat sur l’identité nationale pour désigner la femme voilée comme persona non grata. « Nous ne voulons pas de femmes voilées en France », avait-il lâché à plusieurs reprises.
Afin de contraindre les musulmans à se plier à l’appartenance laïque, Sarkozy avait instauré un ministère chargé d’imposer une assimilation culturelle : le ministère de l’Immigration, de l’Intégration et de l’Identité nationale. Son projet mégalomane avait alors été qualifié de « catastrophe intellectuelle et politique pour l’image générale de la France » par certains spécialistes.
En imposant un nouveau modèle d’intégration, l’ancien président a réussi à exclure les femmes voilées de la citoyenneté pour maintenir une pureté de la culture française. Officiellement, l’objectif de la campagne sarkoziste était de « réaffirmer les valeurs de l’identité nationale et la fierté d’être Français ». Il s’agit d’une approche qui fait penser à celle du régime de Vichy qui, sous couvert d’une « révolution nationale », avait pour ambition de refonder, au détriment des Juifs et des Tsiganes, une identité française tout en faisant l’apologie des valeurs traditionnelles((Le même concept existait en Afrique du Sud où, en 1924, les suprémacistes blancs du Broederbond définirent « l’identité de l’Afrikaner ». Les intérêts des blancs furent placés au-dessus de toutes les autres communautés du pays. La défense de l’identité afrikaner fut une mission sacrée et une base doctrinale sur laquelle le concept de l’apartheid s’élaborera progressivement.))...
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